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SCPO
27 novembre 2004

Sylvain LOISON Licence de Sciences Politiques

Sylvain LOISON Licence de Sciences Politiques 2004-2005

Conférence de méthode de Sciences Sociales

Mme Blondel

LA METHODOLOGIE DES CATEGORIES

SOCIOPROFESSIONNELLES

Table des matières

Nécessité d'expliciter........................................................................................................................... 2

But et Objectif.................................................................................................................................2

Le cadre historique : avant le recensement de 1954........................................................................ 2

Les premices de l'évolution................................................................................................................. 3

L'apport de l'économie..................................................................................................................... 3

L'apport de l'Etat............................................................................................................................. 3

La théorie des classes sociales......................................................................................................... 4

L'organisation du classement...............................................................................................................4

Définir un classement..................................................................................................................... 4

Les critiques et revendications du classement................................................................................. 5

La Nomenclature de 82: PCS...........................................................................................................5

Introduction

Le découpage socioprofesionnel a été fabriqué par des statisticiens et des démographes de

l'INSEE dans les années 50. Deux dates majeurs à retenir : 1954 les catégories socioprofessionnels

et 1982 les professions et catégories socioprofessionnels. Cependant, les efforts entrepris pour

mesurer la production économique par genre d'activité et pour comptabiliser les actifs selon leur

occupation remontent au 19ème siècle. Cette date tardive s'exlique autant par les lents progrès de la

statistique sociale que par des préoccupations nouvelles des autorités publiques ou encore par

l'évolution du droit (droit commercial et législation du travail par exemple). L'impulsion est donnée

par les recensements périodiques (tous les 5 ans) qui intègrent les occupations de la population à

partir de 1831 menés par la Statistique générale de la France (SGF) créée en 1833. Pour l'INSEE,

« la définition des CSP a pour objet de classer l'ensemble de la population en un nombre restreint de

catégories présentant chacune une certaine homogénéité sociale ». Comment se présente cette

nomenclature ? Pourquoi est-elle nécessaire ? Quelles sont ses évolutions ?

I) La nécessité d'expliciter

1) Buts et Objectifs

Le classement en catégories socioprofessionnelles sert de grille d'analyse aussi bien pour les

grandes enquêtes commandées par les administrations publiques que pour les recherches

universitaires ou les études d'organismes privés. Elle est l'aboutissement d'un double cheminement:

– La genèse et l'évolution de la statistique économique et profesionnelle répondant à des

préoccupations et à des visions diverses;

– le développement de la production sociologique sur les classes et la stratification sociale

et en particulier l'impulsion donnée aux recherches empiriques.

Le but des CSP / PCS est d'abord de caractériser les individus et d'abord les actifs selon leur

profession mais en même temps d'associer un statut social à l'activité professionnelle. Son but est

d'éclairer le processus d'interprétation des catégories sociales lié aux opérations de représentation

d'une société :

– représentation statistique : éviter les contraintes techniques (évolution des techniques de

questionnement, de codage et de traitement des données) et permettre un éclairage

historique

– représentation politique : pour une approche politique de la représentation

professionnelle

– représentation cognitive : permet à chacun de se repérer et de faire des rapprochements

dans la vie en société, en rapport avec la profession ou le milieu social; représentation

composite entre le rapprochement des personnes et la constitution d'un ordre social.

A l'origine, nombreux étaient ceux qui voulaient une logique simple ressemblant à une

division en métier (occupation professionnelle) avec les éléments suivants :

– une décomposition en classes sociales (selon le modèle de Marx)

– une grille de qualification mettant en regard des formations et des emplois

– une hierarchie d'aptitudes reflétant des talents innés

– une échelle de statuts dotés de prestiges sociaux différents

– un découpage en milieux regroupant des personnes voisines par leurs comportement

sociaux.

L'avantage est que la CSP renvoie à tout cela avec des significations variées au cours de

l'histoire avec 3 phases principales :

– Une marquée par l'organisation en métiers qui prévalait sous l'Ancien Régime

– Une autre dès 1850 avec une distinction entre salariat et non-salariat

– Une autre après les années 30 avec l'introduction d'une hierarchie du salariat selon des

grilles liées au système de formation

2) Le cadre historique : avant le recensement de 1954

Comment en sommes-nous venus à effectuer un classement ? Tout commence avec la loi Le

Chapelier en 1791 qui abroge les corporations. L'organisation en métier étant rompus, la

comptabilisation devient dispersée. En 1800, le Ministre de l'intérieur de l'époque M. Chaptal

demande aux Préfets d'évaluer le nombre des individus de différentes classes sociales. Cette enquête

dévoile un clivage, en dehors des « propriétaires de biens fonds » et des gens « employés par l 'Etat,

qui oppose les « gens de métier » possédant le savoir-faire acquis par un apprentissage et les « gens

de peine » (manoeuvres, journaliers, domestiques). Cette division est proche de celle des

physiocrates reposant sur la terre, l'Etat, le travail mécanique ou industriel (savoir-faire acquis par

un apprentissage) et tous les autres « manoeuvres ». A ce moment là, pas de séparation pertinente

entre maîtres et compagnons.

La matière première de la nomenclature utilisée au 19ème siècle a été le classement en

métier selon la structure de métier d'origine corporative avec l'énumération de professions conçues

sur le modèle des métiers artisanaux et commerciaux de la France ancienne. L'avantage du

regroupement en métier est que cela façonne une vision du monde social à partir desquels les

découpages se feront (connaître le métier pour pouvoir classer).

II) Les premices de l'évolution

1) L'apport de l'économie

L'évolution au niveau économique va permettre d'apporter des changements significatifs qui

vont permettre de développer la classification selon des principes plus nombreux que celui en

métier :

• Distinction entre maîtres et compagnons (à la base relation père/fils) qui passe d'une relation

patronat/salariat;

• Avec la taylorisation, on voit apparaître la division entre ouvriers spécialisés (séparation nette

des tâches répétitives nécessitant très peu de formation) et ouvriers qualifiés (entretien,

réparation, contrôle, usinage complexe, etc.)

• L'instauration de conventions collectives de branches à partir de 1920, renforcée par les conflits

de 1936 et les accords de Matignon conduisent les partenaires sociaux à établir des listes

standardisées d'emplois et de niveaux de qualifications valables pour toutes les branches.

Apparition dès lors de la hiérarchie à l'intérieur du salariat par niveaux selon des durées et des

types de formation.

• La création de Comité d'Entreprise (CE) avec l'élection des personnels divisés en 3 colléges

(ouvriers + employés, techniciens, agents de maîtrise + cadres)

• Dès 1954, les cadres sont introduits dans le code des CSP en raison du désir de nombre d'entre

eux d'être reconnus comme tels, ni prolétaires, ni patrons.

2) L'apport de l'Etat

L'accumulation de ces strates historiques et la garantie apportée par l'Etat ont donné à la

nomenclature sa physionomie, sa stabilité et son acceptation par des institutions. L'objectif à

atteindre est que tout le monde soit représenté et présent dans une catégorie qui est la sienne ou plus

proche de la sienne. L'Etat se montre à la fois producteur de données statistiques, régulateur du

social et instance légitimatrice des formations :

• En 1946 est élaboré le Statut Général de la Fonction Publique qui unifie le statut des différents

personnels travaillant pour l'Etat et qui établit une hiérarchie des employés de l'Etat en catégories

A, B, C, D basée sur les formations. Cette hiérarchie fournira un modèle pour les employés du

secteur privé.

• La notion de qualification fait passer l'idée de métier (acquis par un long apprentissage au contact

d'un maître tout à la fois père, patron et formateur) vers celle d'un niveau standard homologué par

un diplôme garanti par l'Etat.

• Les structures évoluent. Avant la guerre, SGF : Statistique Générale de la France (recensements

tous les 5 ans + enquêtes). Création en 1946 de l'INSEE et de l'INED et d'un centre d'études

sociologiques au sein du CNRS

• Le droit du travail au 20ème siècle apporte la nécessité de définir pour classer. Les

nomenclatures reflètent les transformations de l'organisation économique et de la codification de

celle-ci, à travers des règles de droit, des lois et des convention qui fait apparaître le droit du

travail et la définition bien codifié du salariat. Ex: groupe des isolés quand il n'y a pas de

définition précise : cas des travailleurs à la tâche à domicile, sont-ils patrons ou ouvriers ?

3) La théorie des classes sociales

La large diffusion du code des CSP dans le public a contribué à leur donner une existence

propre, constitutive des représentations sociales alors que le sentiment d'appartenance de classes

subissait un déclin dans une large partie de la population. Ce double mouvement à alimenter des

confusions entre classifications socioprofessionnelle et système de classes. Toutefois il s'agit de

deux logiques différentes même si la première fournit un outil essentiel pour rendre compte des

rapports de classes dans les sociétés industrielles évoluées. La CSP va donc servir d'élément pour

justifier la théorie des classes sociales et de ces éventuelles évolutions. Les théories des classes

sociales se développe au long du 19 ème siècle en même temps que l'industrie capitaliste.

La nomenclature professionnelle va être mise en articulation avec d'autres données pour

établir une sociologie. L'apparition de la posture critique du courant sociologique des années 60/70

dénonce par exemple l'injustice de la reproduction sociale par le biais de la famille :

1. Logique de la construction de l'outil (entre justice et efficacité)

2. Utilisation pour évaluer l'efficacité du système

3. Dénoncation de son injustice en raison des inégalités des chances liées au milieu familial

(comme par exemple le fait que la réussite scolaire dépend du milieu social et de

l'environnement culturel offert par les parents.

La question centrale reste donc celle-ci : comment envisager la politique des statistiques ?

Les Catégories Socioprofessionnelles sont-elles des catégories statistiques (opération de

représentation d'une société qui au fondement des mesures de la statistique sociale) ou bien des

catégories sociales (opération de représentation des membres d'une société qui fonde un ordre

politique), voire des classes sociales ? Il faut faire attention aux possibilités d'articulation entre les

instruments d'équivalence statistique (codes, critères, moyennes) et les instruments d'équivalence

politique (intitulé homogénéisant du groupe, condition d'adhésions, élus)

III) L'organisation du classement

1) Définir un classement

Comment les codeurs parviennent-ils à classer ? Tout d'abord, à la base, un questionnement

est lancé qui mène vers la définition des catégories puis au codage. Le classement a été fait par

tâtonnements en tenant compte de plusieurs éléments. Les premiers sont les réalités objectives

dégagées au fil des enquêtes par les codeurs :

– des assimilations et interprétations faites par les personnes interrogées

– des étiquetages construisant des équivalences entre appellation d'occupation (inscrits

dans des conventions collectives, dans des intitulés de syndicats professionnels ou

simplement dans l'usage)

– des instructions réglementaires (inscrits dans des manuels d'utilisation de la

nomenclature)

– des interprétations opérées par les codeurs professionnels

– des rouages strictement techniques (inscrits dans des équipements informatiques)

Les seconds à l'aide de la façon dont les différents milieux de la population se représentent

l'espace social :

– les bons exemples dont se servent les gens pour procéder à des assimilations sont liés aux

effets du travail de représentation politique d'un groupe social

– on cible mieux une profession dans une connaissance domestique de la personne et de

son milieu : l'opération de classement repose sur l'interprétation des catégories sociales.

– des mécanismes cognitifs guident l'activité pratique de classement, ces mécanismes

prennent appui sur :

– la formation d'images typiques des catégories qui doivent beaucoup au travail de

réprésentation politique des groupes sociaux

– ils reposent sur une capacité à l'interprétation qui s'ancre sur une construction

personnalisée du milieu social traité comme un monde domestique familier.

Des types de flottements persistent qui mettent le codeur dans un exercice délicat de trouver

une solution afin de ne pas fausser la réalité. Parmi ceux-là, on trouve des difficultés dans la façon

selon laquelle les titulaires s'identifient et répondent au questionnaire. En effet, personne n'est là

pour controler la véracité des éléments déclarés. Egalement, dans l'opération de classement où le

codeur peut se retrouver dans une situation où il ne saura où situer l'individu.

Si l'activité professionnelle est un point de départ, elle n'est pas suffisante pour la simple et

bonne raison par exemple qu'un chauffeur de taxi peut être employé par une compagnie ou être à

son compte ou encore qu'un ingénieur électrique peut exercer son métier comme salarié d'une

grande entreprise ou comme prestataire indépendant de services. Un directeur de personnel peut

faire partie d'une entreprise privée ou d'un service de l'administration publique.

La nomenclature est multidimensionnelle car est le résultat de la combinaison de plusieurs

critères : profession individuelle (métier), statut (position juridique de l'actif), qualification, place

dans la hierarchie, importance de l'entreprise et le secteur d'activité.

2) Les critiques et revendications du classement

Les taxinomies sociales sont un enjeu suffissament important pour entraîner une

mobilisation des organes représentatifs des professions car elles servent à la formation d'identités

professionnelles et sociales. Les querelles professionnelles en lien avec la critique de la

nomenclature reposent sur l'ordre à établir entre les différentes occupations et sur les différentes

façons de les valoriser. Sont dénoncés, les regroupements, les dénominations des rubriques et la

non-reconnaissance. Les réunions servent alors à organiser des compromis et à ajuster les

dénominations au niveau national. Les revendications sont nombreuses :

– les représentants des professions se battent pour obtenir leur place dans la nomenclature;

– ils demandent la reconnaissance de diplômes;

– ils souhaitent mettre en valeur leur occupation par sa capacité professionnelle,

l'apprentissage du métier, le besoin du client et l'emploi garanti par l'Etat;

– Ils cherchent à agir sur la hierarchie des capacités professionnelles en lien avec la durée

des études qui va souvent déterminer un rapport d'autorité entendue comme compétence

technique.

3) La Nomenclature de 82: PCS

Pourquoi une refonte en 1982 ? Lancée en 1978 par l'INSEE, la refonte est entreprise à

l'occasion du recensement de 1982. Les profondes transformations économiques et sociales qu'à

connues la société française entre la Deuxième Guerre mondiale et les années 70 (la « révolution

silencieuse » de Fourastié) ont conduit à l'élaboration de cette nouvelle nomenclature. A cette

époque commençait à être disponible plusieurs élements pouvant permettre une avancée, car le

système était vieilli et dispersé, dans le sens d'une refonte plus proche de la réalité :

– le répertoire français des emplois du CEREQ (Centre d'études et de recherches sur les

qualifications )

– le répertoire opérationnel des métiers emplois (ROME) de l'ANPE (Agnece nationale

Pour l'Emploi)

– le guide des métiers de l'ONISEP (Office National d'Information Sur les Enseignements

et les Professions)

– autres ressources comme les études du CEE (Centre d'études de l'emploi)

– les profondes transformations économiques et sociales ont bouleversé la structure des

emplois : certains emplois disparaissent, d'autres apparaissent et se développe, beaucoup

voient leur profil se modifier. Parallèlement les représentations sociales évoluent.

– la nomenclature de 1954 a subit nombreuses critiques

– une meilleure connaissance de l'espace social a été acquit, résulat de nombreuses

enquêtes socio-démographiques et socio-économiques

– les progrès de la statistique (procédures de codage, informatique) ont fait baisser le coût

du travail d'enquête et permis de recueillir des informations supplémentaires.

Pour permettre d'établir les modifications, d'être au plus proche de la réalité et satisfaire

toutes les demandes des représentants des différents domaines de métiers, il a été nécessaire de créer

des consultations regroupés en 2 groupes majeurs.

Le groupe administratif restreint avec les représentants des ministères de l'éducation, des

Universités, du travail, du commissariat genéral au plan, secrétariat d'Etat à la fonction publique, du

secrétariat général à la formation permanente et des 4 instances de production statistiques :

ONISEP, ANPE, CEREQ, INSEE.

Et un groupe spécial du CNS (Conseil National de la Statistique) qui a permit d'élargir le

champ des consultations : aux syndicats professionnels, aux systèmes de salariés et à divers

organismes comme les assemeblées permanentes des chambres de métiers, de commerce et

d'industrie, d'agriculture ...

Lors de la discussion, des difficultés se sont présentés dû fait de l'organisation des

consultations par « domaines d'emplois » (emplois de la mécanique, de la banque, de la santé ...).

Tout d'abord, sur la notion de « domaines d'emplois » qui ne recouvre pas la notion de secteur (un

électricien peut travailler ailleurs que dans la construction électrique) mais sur de nombreux

domaines les interlocuteurs les plus intéressés étaient les représentants des secteurs (ou des branches

profesionnelles).

Ensuite, les participants changeaient selon suivant le sujet traité : confédération (patronales

ou salariales) pour les discussions d'orientation, fédération ou syndicats sectoriels ou professionnels

pour les domaines spécialisés. Selon les manières dont les professions étaient représentées, le

nombre de participants variaient : 90 personnes pour la santé alors que pour certains domaines, il

était difficile de trouver des interlocuteurs.

Jusqu'en 1975, l'INSEE a utilisé un code des métiers classant l'ensemble des actifs en 444

postes. Cette nomenclature spéciale était mise en oeuvre pour coder la question ouverte : « Quelle

est votre profession ? » Elle cosntituait un système d'appelation plus ou moins usuelle, sans que

soient précisés le statut ou la qualification précise. Avec le code des PCS de 1982 est mise sur pied

une nomenclature détaillée des professions déjà structurées en catégories d'emplois relativement

homogènes selon le type d'activité, le statut et les qualifications.

Bibliographie :

– Serge Bosc sous la direction de C.-D. Echaudemaison, Stratification et transformations sociales,

la société française en mutation (3ème édition), « une spécialité française : les catégories

socioprofessionnelles » (p 35-64), Nathan, coll. CIRCA, 1998.

– Alain Desrosières et Laurent Thévenot, Les catégories socio-professionnelles, La découverte,

coll. Repères (N° 62), 2000.

– Jean-Pierre Briand et Jean-Michel Chapoulie, Les classes sociales : principes d'analyse et

données empiriques, « Classes sociales et catégories socio-professionnelles » (p 53-80), Hatier,

coll. Profil Société (N° 1001), 1981.

– Patrick Champagne, Rémi Lenoir, Dominique Merllié et Louis Pinto, Initiation à la pratique

sociologique (2ème édition), « Catégories socioprofesionnelles et qualification » (p 118-125),

« Les noms de métier comme enjeux » (p 149-155), Dunod, 1989.

– www.insee.fr

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